vendredi 20 janvier 2012

Ma liste de lecture (3)

Alain de Botton convoque quelques grands auteurs (Flaubert, Huysmans, Baudelaire...) et ses souvenirs personnels pour esquisser une réflexion originale sur le thème du voyage. Pourquoi voyageons-nous ? Quel sens donner au voyage ? Le voyage permet-il de se fuir soi-même ou au contraire de se retrouver ? Autant de questions auxquelles chacun apportera ses réponses personnelles.

On remarquera au passage que la couverture de l'édition française ressemble furieusement à la photo de mon blog !

Titre de l'ouvrage original : The Art of Travel.

jeudi 19 janvier 2012

Ma liste de lecture (2)

Présentation sur le site de l'auteur :

"We all spend longer than we would like waiting around in airports, but we rarely discover anything about our fellow travellers or those who work there.

In the summer of 2009, however, Alain de Botton was given unprecedented, unrestricted access to wander around Heathrow, one of the world’s biggest airports, having been appointed its Writer-in-Residence. He spoke with everyone from airline staff and senior executives to travellers passing through, and based on these conversations he produced this extraordinary account of life at an airport and what it says about modern existence.

Working with the renowned documentary photographer Richard Baker, he explores the magical and the mundane, and the stories that inhabit this strange ‘non-place’ that we are usually eager to leave. Taking the reader through the departures lounge, ‘airside’ and the arrivals hall, de Botton shows with his usual combination of wit and wisdom that spending time in an airport can be more useful and more revealing than we might think."

Cet ouvrage est également disponible en français, sous le titre "Une semaine à l'aéroport". Alain de Botton est aussi l'auteur de "The Art of Travel", disponible en français aux éditions Pocket sous le titre "L'art du voyage".

vendredi 13 janvier 2012

Ma liste de lecture (1)


Présentation par l'éditeur :

"'Dark tourism is the act of travel and visitation to sites, attractions and exhibitions which have real or recreated death, suffering or the seemingly macabre as a main theme' Ever since he can remember, Dom Joly has been fascinated by travel to odd places. In part this stems from a childhood spent in war-torn Lebanon, where instead of swapping marbles in the schoolyard, he had a shrapnel collection -- the schoolboy currency of Beirut. Dom's upbringing was interspersed with terrifying days and nights spent hunkered in the family basement under Syrian rocket attack or coming across a pile of severed heads from a sectarian execution in the pine forests near his home. These early experiences left Dom with a profound loathing for the sanitized experiences of the modern day travel industry and a taste for the darkest of places. And in this brilliantly odd and hilariously told travel memoir, Dom Joly sets out on a quest to visit those destinations from which the average tourist would, and should, run a mile. The more insalubrious the place, the more interesting is the journey and so we follow Dom as he skis in Iran on segregated slopes, spends a weekend in Chernobyl, tours the assassination sites of America and becomes one of the few Westerners to be granted entry into North Korea. Eventually Dom journeys back to his roots in Beirut only to discover he was at school with Osama Bin Laden. Funny and frightening in equal measure, this is a uniquely bizarre and compelling travelogue from one of the most fearless and innovative comedians around."
La citation du jour

"The cool thing about being famous is traveling. I have always wanted to travel across seas, like to Canada and stuff." (Britney Spears)

jeudi 12 janvier 2012

Boston en automne
25-30 octobre 2011

(NB : j'ai rédigé le texte ci-dessous au moment de ce voyage. Depuis, les militants d'Occupy Boston ont été délogés et Mitt Romney s'est imposé dans les premiers "caucus", prenant ainsi une longueur d'avance sur ses concurrents dans la course à l'investiture républicaine en vue des présidentielles.)

A quelques kilomètres au sud de la ville, le JFK Presidential Library and Museum (ci-dessous) est une étape incontournable pour tous les visiteurs de passage. Ce musée permet à la fois de redécouvrir le parcours étonnant de John F. Kennedy, depuis ses études à Harvard jusqu'à son assassinat en 1963, et de se replonger dans les années 1950 et le début des années 1960. A écouter le débat télévisé entre Kennedy et Nixon (il y en aura quatre au total), on se dit que les problèmes n'ont pas tellement changé, les Démocrates préconisant une augmentation des dépenses publiques pour relancer l'économie du pays et les Républicains y étant opposés. Le bureau oval de JFK est fidèlement reconstitué de même que le bureau de Robert Kennedy, son frère, alors Attorney General (ministre de la Justice). De nombreuses vitrines présentent quelques-uns des cadeaux reçus par le couple présidentiel, de la part notamment des pays qui ont bénéficié de l'aide du Peace Corps, organisation humanitaire créée par JFK lui-même. L'exposition apprend notamment au visiteur que le couple présidentiel a beaucoup fait pour améliorer la condition des déficients mentaux, et que Jackie Kennedy a envisagé un temps de devenir auteur de livres pour enfants. Parmi les nombreux documents d'époque, les plus intéressants sont sans doute les discours annotés par JFK lui-même. Tout le monde se souvient de celui qu'il a prononcé à Berlin en 1961 mais on sait moins que pour prononcer sa formule restée célèbre, il s'est aidé d'une transcription phonétique griffonnée sur un bout de papier : "Ish bin ein Bearleaner". Amusant, ce clin d'oeil vient rappeler que JFK était humain et avait lui aussi besoin de "béquilles" de temps en temps, et pas seulement pour son dos malade...

Consacrée à la date fatidique du 22 novembre 1963, l'avant-dernière salle de l'exposition frappe par sa sobriété. Quelques écrans plongés dans la pénombre passent en boucle des images d'archives sur l'attentat et sur l'enterrement de Kennedy. On y voit Walter Cronkite, journaliste vedette de CBS, annoncer, la gorge nouée par l'émotion, le décès du 35ème Président des Etats-Unis.

Dans le métro qui me ramène en ville, je regarde la brochure du musée et apprend que le pays compte de nombreux autres "musées présidentiels". Je constate avec une certaine stupeur que les Bush père et fils ont aussi le leur, installé à Houston, au Texas. L'héritage laissé par JFK est unanimement reconnu mais comment mettre en valeur celui des Bush, beaucoup plus contestable ?

Après un détour par le quartier piétonnier de Downtown Crossing et le Chinatown local, j'arrive à Dewey Square, petite place occupée par les militants d'Occupy Boston, déclinaison locale du mouvement Occupy Wall Street, qui dénonce le poids excessif de la finance dans l'économie américaine et la soif de profits des grandes entreprises. Dans le campement, qui compte quelques dizaines de tentes, on trouve un point d'information sur le mouvement, une infirmerie, un point restauration et même une petite bibliothèque. Les nombreux écriteaux plantés autour des tentes comportent des revendications en tous genres, dont certaines prêtent à sourire alors que d'autres semblent plus sérieuses. Au milieu du campement, on peut se faire raser ou couper les cheveux gratuitement sous le regard bienveillant du Mahatma Gandhi (ci-dessus) tandis qu'un peu plus loin, un poster de Jimi Hendrix, idole d'un autre genre, fournit une autre source d'inspiration. A un coin du campement, je remarque un présentoir couvert de petits drapeaux américains et d'objets fabriqués en hommage à des soldats morts pendant la guerre en Irak ou en Afghanistan (ci-dessous). Joe, vétéran de l'opération Desert Storm, m'explique qu'il est content du retrait des troupes d'Afghanistan - "nous n'avions rien à faire là-bas" - mais s'inquiète de la situation économique, lui qui ne vit que des allocations chômage. Selon lui, un tiers de la population américaine soutient le mouvement Occupy Wall Street, un tiers y est opposé et le tiers restant est sans opinion. Il explique la bienveillance de la police locale par la faible ampleur du mouvement à Boston - le campement compte entre 200 et 250 occupants permanents, dont une famille de six personnes habituée, précise Joe, à vivre dans la rue. Avant de repartir, je rencontre un ami de Joe qui tient la tente des vétérans et est en train de confectionner un nouvel objet en souvenir de soldats tués au combat. J'apprends qu'il est le père d'Alex Arredondo, jeune Marine tué en Irak, dont j'ai aperçu le nom sur plusieurs objets. A son invitation, je griffonne un court message de soutien dans le livre d'or dédié à son fils, à la fois gêné et admiratif devant le courage de cet homme, qui trouve malgré tout le moyen de sourire et de me lancer un "God Bless" en guise d'au revoir.

Juste à côté du campus de la Northeastern University se dresse le Museum of Fine Arts. Agrandi fin 2010, ce musée vaut vraiment le détour, pour son architecture d'abord - l'immense atrium de verre, avec en son centre un café chic et design, est particulièrement impressionnant - mais aussi bien sûr pour la richesse de ses collections. Si les peintres européens sont à l'honneur - le musée possède notamment l'une des plus importantes collections de Monet au monde - les maîtres américains du 19ème siècle ne sont pas en reste. Ainsi, les toiles de Martin Heade ou Thomas Eakins côtoient celles de Winslow Homer, l'un des principaux représentants de l'Impressionnisme américain, et de John Singleton Copley, premier grand maître américain de la peinture à l'huile. Ravi de retrouver Long Branch, New Jersey, tableau de Homer dont une reproduction trône dans mon salon (1869 ; ci-dessous, en haut), j'admire également les toiles de Mary Cassatt, seul peintre impressioniste américain à avoir décidé de vivre en France, et le Woman in Fur Hat de Gretschen Rogers (1915 ; ci-dessous, au milieu), qui s'inspire ouvertement de la Jeune fille à la perle de Vermeer. La salle dédiée à John Singer Sargent contient également de nombreux trésors, dont le magnifique The Daughters of Edward Darley Boit (1882 ; ci-dessous, en bas). Je reste un long moment devant cette toile, à la fois émerveillé par les regards si expressifs des personnages (notamment de la petite fille assise au premier plan) et intrigué par le mystère qui se dégage de la toile. L'arrière-plan, laissé dans l'obscurité, suscite en effet une certaine perplexité qui se mêle à la gêne que fait naître le regard insistant des personnages, pointé droit sur le spectateur. Cette impression d'étrangeté est renforcée par le fait que le personnage adossé contre le grand vase en porcelaine ne nous regarde pas. Sait-elle quelque chose que les autres filles ne savent pas, a t-elle quelque chose à cacher ? Le mystère reste à creuser...


Je jette un dernier coup d'oeil à deux tableaux de Hopper et à la salle dédiée à la photographie avant de prendre le chemin de la sortie. J'ai peut-être visité à peine un tiers du musée mais la fatigue me gagne ; les nus de Degas, qui font l'objet d'une exposition temporaire, peuvent aller se rhabiller...

L'intégralité de la journée du lendemain est consacrée à une visite guidée de Boston et des villes historiques de Lexington et Concord. Le temps est froid et pluvieux mais je suis quand même sensible aux charmes des maisons en bois de Lexington, dont la plupart sont décorées de citrouilles, à quelques jours d'Halloween... La ville de Lexington est connue pour avoir été le théâtre, le 19 avril 1775, de la première bataille de la Guerre d'indépendance. Dans le "Visitor Center", je photographie le diorama qui commémore l'événement avant d'apprendre, en lisant la plaque explicative qui l'accompagne, que les photos sont interdites... (ci-contre). Heureusement, le figurant qui se tient juste à côté, en costume d'époque, ne m'en tient pas rigueur. La ville de Concord, située à quelques kilomètres de Lexington, est un autre haut lieu de la Guerre d'indépendance mais on peut aussi y voir les maisons de grands noms de la littérature américaine, dont celle dans laquelle a vécu pendant plus de 40 ans Ralph Waldo Emerson. Avant de revenir dans le centre-ville de Boston, nous faisons une halte au USS Constitution, frégate construite en 1797 qui fait aujourd'hui partie de la US Navy (ci-contre). Prise dans les cordages du navire, la "skyline" de Boston qui se dresse en arrière-plan revendique fièrement sa modernité et semble braver "Old Ironsides", surnom donné au USS Constitution en raison de la solidité de sa coque. Pour la petite histoire, le navire se trouve dans un chantier naval qui fait lui-même partie du quartier de Charlestown. C'est dans ce quartier, qui a longtemps eu mauvaise réputation, que Ben affleck a tourné son film The Town.

Après un détour par Fenway Park, l'antre mythique des Red Sox, l'équipe de base-ball locale, nous revenons vers le centre-ville en longeant Boylston Street puis Beacon Street, le long du parc de Boston Common. A Beacon Hill, nous apercevons la Massachusetts State House, dont la porte d'entrée, selon notre guide, ne s'ouvre que lors du départ du gouverneur. A propos de gouverneur, je demande à ma voisine, une dame venue du Texas, quelles sont les chances de Rick Perry pour les primaires républicaines de 2012. Elle trouve que le gouverneur du Texas n'est pas assez "malin" et mise plutôt sur Mitt Romney ou Herman Cain, nouveau venu dans la campagne. Mais d'ici août 2012, me dit-elle, les choses peuvent encore changer...

Le lendemain après-midi, par un temps toujours froid mais ensoleillé, je remonte Boylston Street jusqu'au Boston Common. De l'autre côté du parc, je contourne la State House pour m'engouffrer dans Beacon Hill (ci-dessous), le quartier le plus huppé de la ville où un certain John Kerry possède une maison. Avec ses rues étroites bordées de townhouses en briques, le quartier ne manque pas de charme et fait oublier un temps le tumulte de la ville. Dans Philips Street, je m'arrête devant Vilna Shul, synagogue construite en 1900 (ci-dessous). Je pousse la porte et suis accueilli par un homme en kippa qui me propose de rejoindre la visite guidée en cours à l'étage. Je monte et me joins à la seule autre touriste présente. Notre guide nous raconte l'histoire de la synagogue et nous explique que les trois puits de lumière sont particulièrement utiles lors de la prière, les Juifs n'ayant pas le droit d'utiliser l'électricité le jour du Shabbat (quand il est vraiment indispensable d'allumer les lumières, un "goy" - non-juif - s'en charge). Après un cours accéléré sur le yiddish, le kaddish (la prière des morts) et Sukhot (la fête des moissons), je ressors et prends la direction du quartier de North End, via le Government Center, où se trouve notamment l'Hôtel de ville.

North End, le "Little Italy" de Boston (ci-dessous), compte un nombre incalculable de restaurants qui attirent des hordes de touristes. On y trouve aussi la maison de Paul Revere, l'un des meneurs de la révolution de 1775, à propos duquel circulent plusieurs blagues comme celle-ci : "Ayant eu 2 femmes et 16 enfants, on comprendra qu'il n'était jamais chez lui !". En revenant vers le centre, je passe à hauteur du Leonard Zakim Bridge, qui s'élance vers Charlestown. Le TD Garden, juste à gauche sur la photo (ci-dessous), accueille les matches à domicile des Boston Celtics (basket) et des Boston Bruins (hockey sur glace). Sous le TD Garden se trouve la North Station, gare qui comme son nom l'indique dessert la grande banlieue nord et des villes plus lointaines comme Portland dans le Maine. Dans le métro qui me ramène vers Back Bay, le quartier de mon hôtel, je ris tout seul en repensant à une blague lancée au public par des "street performers" aperçus un peu plus tôt : "Obama wants change, we want dollars".

Avant de rentrer, je passe au Starbuck's le plus proche pour prendre un déca. J'ai toujours une petite appréhension en allant au Starbuck's dans ce pays. Vous allez me dire qu'il n'y a rien d'extraordinaire à passer prendre un café ? Eh bien essayez d'entrer dans un Starbuck's aux Etats-Unis et de commander simplement "a coffee please". Vous allez tout de suite comprendre, en voyant la tête de votre interlocuteur, que quelque chose cloche. Non, pour passer inaperçu, il faut connaître le langage Starbuck's et commander par exemple "a tall Decaf with room for cream" ou, plus impressionnant, "an iced Venti quad nonfat with hazelnut caramel macchiato with whip". Comment s'étonner après ça du succès des sites qui se proposent de déchiffrer ce jargon impénétrable ?

Pour le dernier après-midi, je traverse la Charles River pour me rendre à Cambridge, où la prestigieuse Université de Harvard attire chaque jour des touristes venus du monde entier. Compte tenu du temps exécrable, je renonce à me balader sur le campus - déjà visité au pas de course sous la pluie trois jours plus tôt - et m'engouffre dans la librairie The Coop. Le grand présentoir à l'entrée met en valeur les derniers ouvrages des profs de l'université mais l'oeil est surtout attiré par l'omniprésente biographie de Steve Jobs, sortie le 21 octobre. Vu l'épaisseur du volume - dans les librairies américaines, les livres épais sont souvent regroupés dans un rayon appelé "Doorstoppers" - il ne fait aucun doute que la version pour Kindle ou pour Nook, le dernier venu sur la planète des e-books, est promise à un grand succès.

Au sud de l'Université de Harvard, le Massachusetts Institute of Technology (MIT) déploie son vaste campus à l'est de Main Street. Les frais de scolarité y sont tout aussi élevés (environ 50 000 dollars par an dans les deux cas) mais la qualité de l'enseignement dispensé au MIT est reconnue dans le monde entier et la liste des anciens élèves est impressionnante (citons notamment Paul Krugman, Prix Nobel d'économie, ou Robert Noyce, cofondateur d'Intel). L'impitoyable sélection à l'entrée - près de 90% des dossiers de candidature sont rejetés - achève de me convaincre que le MIT n'est pas fait pour moi... Parmi les dizaines de bâtiments qui composent le campus, le Building 32 attire tout particulièrement l'attention (ci-contre). Conçu par l'architecte Frank Gehry, à qui l'on doit également la Cinémathèque à Paris, ce bâtiment, inauguré en 2004, est censé symboliser la créativité qui doit nécessairement inspirer tout esprit scientifique. D'où sa forme déstructurée et ses fenêtres de guingois. L'histoire ne dit pas si le Building 32 constitue vraiment une source d'inspiration pour les étudiants mais il fait en tout cas les affaires des avocats, le MIT ayant intenté en 2007 une action en justice contre le cabinet de F. Gehry pour malfaçons...

En attendant le vol du retour, je pense aux passagers des vols 11 d'American Airlines et 175 de United Airlines qui sont eux aussi partis du Boston Logan International Airport, un beau matin de septembre 2001, sans se douter un instant de ce qui les attendait. Ceci expliquant sans doute cela, les contrôles de sécurité, d'ordinaire si pénibles et interminables, ne m'ont jamais paru aussi agréables.